Compagnon d'une route déjà longue, Bren Cameron, le 'Paidhi' (interprète-négociateur), aurait laissé à sa traductrice le souvenir d'un parfait honnête homme si ce n'était la mesquinerie manifestée envers sa fiancée demeurée loin de lui, parmi les humains. Sagement, C.J. Cherryh a ménagé quelques défaillances à ce héros à qui incombe la lourde tâche d'incarner les vertus qu'elle s'acharne à défendre au fil de son oeuvre : tolérance, audace intellectuelle, respect absolu de l'autre, souci de l'environnement, etc. Sur fond de planète follement exotique, peuplée d'indigènes aussi fabuleux qu'inquiétants, la démonstration se fait "à l'américaine", dans un face à face entre "eux", les autochtones, et "nous", minorité de pionniers originaires de la Terre. Bren Cameron n'est autre que le fléau de la balance, celui par lequel la rencontre se déroule telle qu'elle aurait dû dans le meilleur des mondes, depuis le débarquement des Conquistadores en Amérique jusqu'au sort indigne que les Etats-Unis réservent à leurs minorités ethniques en passant par la colonisation de l'Afrique, etc. Rude leçon. Elle concerne toutes les sociétés rapaces, rongées par l'ethnocentrisme et par le racisme, qui est sa grimace. Que la fiancée esseulée nous pardonne, Bren Cameron a droit à toute notre indulgence.
Iawa Tate |